Raphaël Dormoy

Littérature, écriture

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13.02.2017

C’est vrai que je puis partir
pourquoi être pressé de rentrer chez soi
Ce chez soi est partout je l’oublie trop souvent
en chacun de mes pas déjà
et les portes sont en chacune des parties (que mon corps regarde)
Portes omises, portes entrouvertes
Seulement voilà il faut cette excitation de lumière
ce départ de feu, ce quelque chose, pour les voir
aujourd’hui, ce fut toi lumière
réaction en chaîne

C’est vrai que je puis partir
pourquoi être pressé de rentrer chez soi
Ce chez soi est partout, je l’oublie trop souvent
déjà, en chacun de mes pas  
et les portes sont en chacune des parties (que mon corps regarde)
Portes omises, portes entrouvertes, portes mises,  
Seulement voilà, il faut cette excitation de lumière
ce départ de feu, ce quelque chose pour les voir
aujourd’hui ce fut toi lumière,
réaction en chaîne.

01.01.2017

Trois corneilles, telles les trois Grâces, se disputent la flaque. Il y a une saignée dans la rigole. Par terre, les feuilles sont pourries, malades, rabougries. Et le sapin, laissé sur son pic, à côté du platane enraciné dans le béton ; est-ce pour le consoler ? Ce dernier le peut-il ? L’escalator amène son bruit en surface. On vide les bouteilles dans les containers. On me crache une fumée de cigarette dans la gueule. Et, c’est à Paris, des flaques de vomi sur le boulevard Général Leclerc sont nombreuses pour ne pas être vues : le trop-plein, me dis-je, le trop-plein, se vider bien, avant d’arriver. L’espérance roule dans les mégots, partout par terre. On vend des hyacinthes, 3 euros pièce. Mais après c’est moins cher. Sagement assis dans les voitures. Sagement assis dans le langage. Ça y est ! la nouvelle année démarre. Le désarroi dans les yeux, les phares de l’autre, les warnings, les escalators font jaillir les blouses, les chuchotements, les sourires, la vie. La ville s’ouvre à nouveau. Je n’ai pas de gants. Je me réchauffe les mains dans les bougies de l’église. Puis je mets une bougie pour les miens. Je pense au Messie. Deux conditions, l’une inclusive l’autre exclusive, alors que le miracle était possible. Puis je quitte ma prière, et je vais regarder la crèche. Il y a la paille, les feuilles mortes, un âne, un bœuf, l’eau qui court dans la rigole, et un aigle qui veille. L’aigle est peint. Il y a les arbres aussi. Le Subway vient d’ouvrir. Les pigeons tentent l’aventure du mégot sur le sol, des fois que, mais non. L’onglerie clignote. Un estropié marche en invectivant le vide. J’ai le cul qui gratte. Vivement lundi que le boulot reprenne, avec son confort, ses joies, ses espérances. Vivement demain. Ça permettra de mieux savourer l’instant, comme le dit la publicité de Coca-Cola sur le mur. Les pigeons se sont rassemblés autour du manger. Dans le ciel il y a toujours les décorations de Noël. Ce sont des jeux d’étoiles filantes. Elles ne sont pas allumées. Le jour n’est pas encore éteint.

20.12.2016

La poésie m’a quitté. C’est peut-être une bonne chose. Je longe les murs. Elle n’est plus en moi. C’est peut-être une bonne chose. Dans ma chambre, les livres s’entassent comme les souvenirs rangés au fond des cartons ; sauf que les livres sont placés sur mes étagères. Parfois, l’un d’eux traîne par terre pour une page qu’on chercha. Mais la page a disparu. La vie me semble  faite des multiples fils d’un étendoir – prendre soin de ces fils, les dérouler, les faire grandir – sauf qu’aujourd’hui, il n’y a plus rien à sécher. Cette absence de vue m’offre une vue sur la vie elle-même. Aujourd’hui la mienne s’exerce à… Point.

25.11.2016

Je resterai dans l’exploration. J’ai pour cela besoin du temps. Le temps dorénavant ne fait plus défaut. Certes il peut s’arrêter. Mais comment ferait-il défaut ? Mon quotidien est réglé de façon à régler le quotidien. Cela fait des guirlandes si je mets bout à bout l’injonction. Je souhaiterais faire autrement mais ce faire autrement me dérange. Il faudrait que je résiste à la tentation de faire autrement. Sans quoi je vais me retrouver avec des pelotes de temps partout. Partout. Je n’ai pas d’autre souhait, je n’ai pas d’autre vœu que d’avoir un quotidien stable, réglé, un vrai quotidien. Cela me demande une vraie patience. Je ne viens pas facilement à bout des injonctions. Elles sont comme de la ferraille entre mes doigts. Chacune d’elles me parait comme une branche qu’il faut tailler. Mais comment m’y prendre ? Comment tailler précisément ? Comment tailler la branche au-delà de sa… Le quotidien m’est d’une légèreté favorable. Je n’ai plus à penser ce qui advient. Ce qui advient. Ce qui est advient est. C’est la grand force. Il y a vraiment toutes les fabrications du possible.       

05.10.2016

Autrefois j’aimais la plage. Autrefois j’aimais la plage. Mon plaisir était double, inouï. Les autres ne comprenaient pas. J’avais du mal à mouvoir mes lèvres qui tremblaient. Pis, je répétais. Répétez ! me disait-on. Autrefois j’aimais la plage. Et il fallait deux fois à l’autre pour comprendre mon plaisir, sans jamais rien sentir. Autrefois j’aimais la plage. Moi, c’était ma façon heureuse, méthodique, mélodique, de dire à l’autre mon plaisir. Autrefois j’aimais la plage. Autrefois on ne s’encombrait pas. On laissait ce qui comptait. Moi, j’avais le sentiment d’encombrer avec mes deux bagages.

29.06.2016

Aujourd’hui, mes heures gagnées étaient : un rayon de soleil perçant le soir ; les pas d’un enfant explorant le monde, et son centre de gravité ; puis, à et instant de me coucher, le livre posé sur ma table, que je ne lirai pas ; enfin ce moment – ouvert. Si je mets bout à bout ces éléments, cela fait : six secondes pour le premier, trois pour le second, deux pour le troisième, et les secondes actuelles ; soit moins d’une minute aujourd’hui. C’est peu. Mais si ce rayon de soleil n’était pas venu, si l’enfant ne m’était pas apparu, alors ma journée n’eût connu nulle grâce, et je serais resté au seuil du monde et de moi-même, la porte fermée. 

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