Littérature, écriture

Catégorie : Poèmes (Page 15 of 32)

Journal des poèmes 

17.08.2021

Faire du beau parmi les mailles du réel
Jouer cette note-ci plutôt qu’une autre
La vie est un enchevêtrement de cordes,
invisibles, ne l’oublie pas, qui vibrent.
C’est comme cette concentration à laquelle tu t’emploies
chaque jour dans le chemin physique des jours,
concentration à voir, qui est un relâchement de l’esprit ?
Sauf que là tout se joue dans l’espace aérien, subtil.
Le téléphone va sonner, prépare-toi.
Cette autre personne qui te pousse dans le vide, vois cette corde,
musicale. Apprends à jouer.
Et si la chose te semble difficile, techniquement impossible,
elle n’est peut-être pas plus compliquée qu’un sourire lâché
en direction d’un sourire.

 

15.08.2021

Je marche
Je marche au même endroit 
Mais je respire,
      plus amplement
Et je maintiens cette amplitude dans la marche

J’ouvre,
J’ouvre les yeux
J’ouvre les yeux dans les yeux
Et je souris intérieurement(,)
       Sourire en coin

Et je respire un peu de moi
    que j’expire  Oh, oh oh
Oh monde vierge  

Je sors alors ma machine 
O vieux boîtier,
J’arme le déclencheur
Je débraye la virgule
 
Et je vous en prie puisque vous êtes là

          Souriez. 

14.08.2021

44 ans
Des yeux cernés 
Combien de temps encor / en corps   
Quelle mémoire la vitre gardera-t-elle ?
Qui gardera sa mémoire 
Ici ou maintenant
C’est le même ici ou maintenant 
Les stations comme les jours 
À laquelle descendrai-je 
Pour quelle correspondance ?

 

08.08.2021

Regarder le ciel, regarder le bleu
Regardez le bleu, vraiment
Pour la première fois
Même si maintenant
La lumière rend le ciel laiteux.
Regarder le bleu, tenter de le retrouver
De s’en souvenir,
Mais il a disparu.
Un nuage à la forme d’une méduse passe
S’il pouvait dire Une méduse à la forme de nuage passe,
S’il pouvait dire ceci, le bleu aurait-il reparu ?
La méduse a disparu, elle aussi
Il reste un ciel plus laiteux
Presque une surface blanche
Sur laquelle il aimerait pour la première fois
Dire ce bleu.

 

05.08.2021

Au bout de la ligne 
la mouette
il tire ; rit-elle ? 
Au bout de la ligne
le ciel 
la mer et les vagues
et les coureurs qui passent sur la langue de sable. 
Au bout de la ligne
la mer 
les vagues et l’enfant
et les ricochets que la mer fait dans les yeux de l’enfant. 
Au bout de la ligne
le vent, — vent constant
qui agite ombre comme étendard. 
Au bout de la ligne 
le désir ! le désir !
Et l’homme resté tout le jour s’enfonce dans la mer 
et la jette au plus près du soleil.

 

05.08.2021

Nulle part nulle part 
Mets-le en écho en porte-voix, à la station de bus  

Tout bu jusqu’à la lie
Nulle part

Seuls les emblèmes sur les calandres des voitures me feraient adhérer à l’actualité d’un monde 
Seuls les horaires des bus affichés à la station de bus me feraient croire en l’existence d’un temps   
Seuls l’asphalte et la ligne blanche me feraient croire en l’existence de règles et d’une technologie contemporaine,
Tandis que le soleil descend et que le bus ne vient pas

Nulle part 
Parmi les euphorbes les scabieuses maritimes et les cannes de Provence.

 

01.08.2021

Des boules de sable,
Voyons voir ce que j’ai
Et voilà dix boules de sable, dit mon fils
1 euro la boule de sable
Onze boules de sable,
On va pouvoir vendre beaucoup de choses
Papa, les coquillages sont incroyables,
Tous les coquillages que je trouve sont incroyables
Regarde à l’intérieur. Regarde là.
C’est incroyable n’est-ce pas
Il ne manque plus que la ficelle
Qu’est-ce qu’on va faire des boules de sable.
Le poème à la boule de sable.

 

18.07.2021

11 h 20.
15 minutes. C’est le temps dont je dispose pour un écrire un poème.
Je suis assis sur une chaise. 
Je suis dans la Halle des expositions, ligne 9, transformée en vaccinodrome pour cette occasion. 
Je suis assis sur une chaise. 
Je suis à l’affût du poème, ou pour être exact à l’affût du signe. 
Mais, être assis sur une chaise est en soi un extraordinaire
Et plus encore, dans ce monde où chacun de ses attributs fait sens. 
Je me lève, je me rassois. C’est un quart d’heure, me dit-on.
J’ai envie de serrer quelqu’un dans mes bras. Je pourrais toujours prétexter des effets secondaires de la seconde dose.
Sous le plafond, il y a des pictogrammes. Que lirait un enfant ? 
Je me rends compte que chacun des hommes assis sur chacune des chaises est un pictogramme. 
L’espoir serait de se dire que nous pensons tous la même chose, au-delà de la représentation qui fait de chacun de nous un pictogramme assis sur une chaise. 
Mais les liesses sont pour des événements particuliers, jamais pour célébrer le réel. 
Il est 11 h 29. Je suis en avance sur mon temps.  

12.07.2021

Fermer les yeux, c’est tout.
Mais les fermer loin longtemps
Comme on plonge dans l’océan.
Mais l’épaisseur des cigales, nombreuses — plurielles.
Fermer les yeux est un acte d’éveil
Pour se retrouver ici, au même endroit,
un étage plus haut.
Il ne tiendrait qu’à soi de faire tinter la clochette
qui libère parmi soi, autour de soi dans les hautes herbes,
le rire embusqué.

 

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