Littérature, écriture

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07.03.2024

Nouveau jour, nouveau jour, dirait le refrain de la chanson oubliée.
Je n’ose regarder. Mais si, j’y suis !
Je savoure le temps rétréci, cette seconde,
comme le coléoptère sa goutte d’eau.
Ciel bleu à portée de doigts,
Ciel bleu à portée de lèvres.  
Alors peut-être faudra-t-il assembler chaque seconde, chaque morceau chaque récit, d’un instant l’autre, d’un instant l’autre, comme une phrase qui coud.
Et s’en vêtir. 
Nouveau jour, nouveau jour, dit la chanson.  

14.02.2024

La maladie vous écrase à la surface des mots, vous presse, vous oppresse. Vous vous retenez de tousser. Un nénuphar dans un bois tassé pourrait-il faire le pari d’un rai de soleil (s’il avait une conscience?) ; mais un brin de fleur au milieu d’une poudre calcinée, à quoi rêverait-il ? D’eau, serrant sur son cœur son souvenir en forme de goutte. Est-ce ainsi au moment du départ ? Chérir la vie et remercier ? Une cave ne peut servir de séjour à moins qu’on soit rat ou mite. Mais parfois il arrive que le cœur y ressemble. Alors quelle espérance former ? Assis au fond du RER, sale parmi soi (canettes, crachat) il suffit de se rappeler une goutte, de la regarder, n’importe laquelle des gouttes tremblant sur la vitre, et peut-être un regard, une personne, vibrant comme elle pour se rappeler ; se rappeler quoi ? Voilà bien une chose difficile à énoncer, à justifier comme si les deux mains arrachaient au récit la tête noire d’un monstre marin sorti des eaux d’encre, avant de la laisser repartir. Se rappeler quoi ? Il restera, en plus de la calme éternité, un rai de lumière, pour plus tard, plus tard. Et de se dire en suspend, quelle note jouera sa corde. 

04.02.2024

Ah si je pouvais faire un pas, un petit pas de côté.
Mais pas encore.
Je pourrais m’allonger dans le présent, pour me rendre avec lui.
Oh chien fidèle, oh vieux compagnon !
Toujours là, frétillant : à m’attendre
M’attendras-tu, longtemps encore ?
Ah si je pouvais faire un petit pas,
Ce petit pas ce petit pas de côté.
La caresse de la langue.

03.02.2024

Les hommes sont dans leur voiture de pensée. 
Mais pas les arbres. 
Il klaxonne. Les phares éblouissent le passant. 
Pour la première fois, je vois la place. 
Tant de détails qui restaient cachés, se soulèvent. 
Mon inquiétude de cette découverte se lit dans mes yeux.
Et encore je ne regarde qu’un côté de la place, que d’un côté du banc. 
Le banc tremble. 
D’autres ont ils la chance d’avoir le regard qui marche, quand ils passent ?
D’autres connaissent-ils cette place aussi bien que je l’ignorais.  
Je la traverse depuis des années. 
D’ici, de ce banc, pourrait-on saisir le monde dans ses bouleversements, ses soubresauts ? sa constance.
La place s’est illuminée. Il est 17h57. 
Je regarde le sol. 
Le vertige.  

 

15.12.2023

Monde contraint, les murs se sont refermés. Mais j’ai ma chambre, dans laquelle tient tout. Sauf l’espérance. L’espérance est un oiseau – volage allais-je dire, et la fenêtre est toujours ouverte ici, et ma chambre est toujours prête à l’accueillir. Je n’écris plus depuis de nombreux mois. Le monde s’est refermé et j’ai ma chambre. Bien sûr cette chambre pourrait disparaître. Il suffit d’un accident, minime. Comme glisser, pour que le mur se fissure. Mais l’espérance nous pointerait, derrière la fissure, la mer. Et puis force est de constater que tout va bien, que la santé est bonne, que je ne manque de rien ; même si l’avenir n’est pas acquis, ne l’est jamais. Ceci, cette chambre, doit être mis quelque part, au fond de mon cœur. Chaque jour que je sors, que chacune de mes adresses se souvienne de ma chance. Car cette chambre contient beaucoup. Tout le monde m’attend ici. Et si comme cela m’arrive depuis quelques mois, même si j’oublie l’espérance, il faudrait que j’aie au fond de mon cœur son souvenir ou sa part vivante. Mais comment faire ? Je retrouve parfois quelques poèmes. Mais comment se souvenir du feu qui n’éclaire pas ? Comment se souvenir de la flamme qui ne crépite pas ? J’ai cette chance, j’ai cette chambre. C’est un là au fond de soi. C’est peut-être avec un peu d’entraînement qu’elle pourrait m’accompagner au quotidien, à mes rendez-vous, et lors de mes rendez-vous manqués.

 

28.03.2021

J’ai de la chance. Je vais pouvoir écrire, malgré tout. Par exemple, aujourd’hui j’étais au cimetière, Il y avait beaucoup de passants, un esprit comique aurait dit que les hommes étaient sortis de terre, de leur tombeau, qu’ils profitaient de la lumière de la vie. Il y avait aussi le merle, harmonieux plus qu’un autre oiseau, dont les vocalises nous amenaient loin des jours passés. C’est peut être cette grosse lune hier soir, surplombant le ciel, qui attire le printemps et tous les vivants, par le contour épais qu’elle laissa dans le ciel. Oui j’ai cette chance de pouvoir écrire, c’est à dire d’avoir un espace où consigner des phrases, des mots issus du présent comme on ramasse des bouts de bois avant de les poser à l’abri quelque part, avant la tomber du jour.

 

24.09.2023

J’écris depuis ma chambre. Je suis dans la gare. Mais j’écris depuis ma chambre. La gare Montparnasse est accidentée. Les trains circulent mal. Mais j’écris depuis ma chambre. Reconnaitre ce point, cette localité, est un impérieux. Car c’est avec étonnement que la localité se manifeste. Pourrais-je être autre part tout autant. Mais je reconnais un lieu autre, parfaitement localisé, d’où je contemple les passants, la gare, les passants sous le panneau des horaires. Diantre, quelle richesse. Le second impératif est justement l’acte d’écrire. J’y suis. Y a plus qu’à. La chambre pourrait être ailleurs, ou la pièce pourrait être autre chose que l’acte d’écrire. Mais c’est ainsi. Diantre quelle chance, tant de détails tous ces détails. 

 

27.07.2023

Nous voyons une forme du monde. Nous voyons l’une des formes du monde. Dans sa forme la plus pure elle est silencieuse. Belle aussi, par ces émotions de lumière. Mais aussi mouvement. Et immensité. Donc vertige. Concentrons-nous sur la lumière. Et sur ce chemin de campagne sur lequel nous roulons, moi et mon fils. Chemin fleuri, d’Irlande, bucolique. Chemin bucolique d’où sous les paupières. Doux. Nous y sommes. Parmi les moineaux. Non loin de la brume qui lèche et dévore les collines. Nous y sommes. Au-dessus des flaques, éparses. Au-delà des nuages. Nous y sommes. Parmi les sansonnets. Qui ponctuent la route comme des noires, sur des fils – tandis que les moutons font la blanche dans les demi-tons de vert vers. Nous y sommes. Que dire ? Sinon bêler bêtement ? Or bêler la beauté. Telle est la question. Mais pas encore. Pas là. Pas ici. Avancer devant ces paysages, devant cette immensité. La route elle-même. Elle pourrait être explosion. De larmes. De joie, de verdure de lumière. Que dit la ligne. Que disent les routes ? Ma manière de consommer le monde n’est peut-être pas la bonne. Quelle distance ai-je ajouté ? Peut-être n’ai-je pas trouvé les bons trous pour apprendre à jouer. Peut-être que tout sonnerait faux, y compris les sourires. Que tout sonne faux, que tout sonne fou. Que tout sonne faux. Que tout sonne fou. Instrument mouillé. Et la partition reste muette. MUETTE. De l’ici loin. De l’ici près.

The road of the lost valley

21.05.2023

Et s’il existait un ordre, un ordre supérieur, ou des ordres, plusieurs, une injonction à voir, entendre au dessus, au-delà de la narration. Oui, mais pour quel alors ? pour quelle narration ? Non pas un artifice : ou alors un procédé qui mettrait en abime l’artifice du langage, je veux dire mettrait en abime l’artifice de la réalité. Mais pour elle, nul besoin d’inventer une langue autre. Il suffit de la faire monter sur le ring et de la détricoter. Allons donc je ne me vais pas m’y rendre à présent. Je l’ai déjà fait. Je vous l’ai déjà montré. Ne faites pas semblant. Ne dites pas Nous n’avons pas vu. Et puis factuellement je suis au cœur du train qui va à pleine vitesse. Je suis installé en sens inverse de la marche et je n’ai que faire de savoir si ce train est une métaphore de la phrase. Croyez bien que je sois ailleurs. S’il existait un ordre dont la phrase découlerait, un ordre supérieur, mais que le principe, que la narration dans son principe premier serait incapable d’ouvrir de toucher, de voir ? Par un impossible. Et par un fait que certains savent, à demi mot, par… vous savez bien, comment nommer ce bougre vous savez lui dont le regard luit quand son œil émerge du reflet comme celui du crapaud à la surface du lac. Celui qui calque tout au point de faire disparaitre, le démon lequel, celui des similitudes. Allons, vous l’avez déjà côtoyé n’est-ce pas une fois. Celui qui fait que nous croyons être là dans l’espace physique et que toucher signifie toucher. Je ne parle pas de langue, mais de ce que le point dans l’œil soit touché par le doigt au moment ou le doigt touche le point dans l’œil. Ouille. J’aimerais vous voir ailleurs, mais nous sommes dans le train un Ouigo 7472. Il est exactement 11 h 47 et le train circule quelque part entre le tronçon Nîmes Paris, ajoute des secondes suffisantes pour être au point. Comme nous sortons du tunnel. Après toutes ces années, après avoir découvert jusqu’à, jusqu’à la porte entre l’ici et, comment la nommer. Porte entrebâillée. Je crois possiblement qu’il existe un ordre qui changerait radicalement ma façon d’écrire et donc ma façon de voir. Ces deux points sont liés n’est-ce pas, au point de devenir signe de ponctuation d’où découle le flux narratif :  Mais aussi, vous le savez, comme le point derrière le point : alors, oui, une manière radicalement nouvelle, loin du style mais un degré zéro de la phrase. Phare et rase campagne.

28.05.2022

C’est une chance de s’aimer 
Semer ici et là, 
Le bruit quand même autour,
Mais les coquelicots 
Et l’ombre des feuilles et donc le chemin 
tendre sous le soleil de mai. 
La difficulté est le feu aux quatre vents,
Tourments tournant,  
Mais se concentrer sur la braise.   
Laisser le geôlier se laissait rire sur son anneau ; 
Ne pas se laisser effaroucher par la rose, 
Dans sa posture altière. 
Seule la nuit est altière ; les départs de flammes,
Tu seras flamme à ton tour,
et toute parole nourrirait ton bois.  

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