Littérature, écriture

Catégorie : Journal des rêves (Page 1 of 2)

28.12.2024

Découverte dans le sommeil d’une nouvelle classe d’actifs, que le reflet prisonnier du corps touche en partie. Incapable de reconnaitre sa langue, mais apte à la dire. Il faut faire confiance au plongeon, au point fixe. Le drame est que la piscine vide, elle. Ici et depuis le point, tout complément d’objet serait – comment dire, le comment dire ayant l’apparence d’un, comment – comment dire, oh clapotis. Dans le rêve, tout fut ; et de l’épaisseur scintillait le point. Ce n’était pas le rêve, mais l’instant peu avant l’éveil, quand la conscience s’époumone en oiseau. La découverte déplaçait littéralement le sujet de ses croyances habituelles par le fait même que le raisonnement : ouvrez ! Combien en fis-je par le passé : oh avenir radieux ! Un, deux, trois, je les compte sur une main et je compte toujours sur elle, qu’elle s’accorde à mon âme.

23.12.2024

Apprendre, accepter cette part qui fait que je ne suis plus tout à fait au même endroit
Et que seul la part lucide entremêlée des rêves me fait constater
A plusieurs reprises ; me montre un autre chez moi,
Que je reconnais. Qu’ai-je ramené ?
Une sensation, une émotion, une impression ?
Me souviendrais-je demain
Quand je retrouverai ce texte au hasard des feuilles dispersées
Ou ceci ne sera-t-il plus qu’une sensation vague, qu’une amorce de rêve,
Qu’un morceau de papier qu’on garde pour la photo.

 

16.09.2024

Il faut prendre le mot et le tordre, surtout ne pas suivre ce que montre l’œil, ce que montre le torve, ne pas tomber dans le piège, et conséquemment tomber dedans, dans l’œil. Ouvrir le mot : ce qui spontanément ouvre les rêves. Au bout d’une forme, le mot ne revient pas en son état antérieur. Le mot reste là abandonné, laissé comme une épave à l’intérieur du parking. Les rêves continuent d’entrer ci et là, comme on cligne des cils sans faire l’effort du paysage. Lequel attraper ? Le propriétaire peut-il nous rencontrer ? Le propriétaire d’une maison devenue plus réelle que la mienne à cet instant du rêve. J’imagine qu’il en va de même pour tout : pour tout ce qui nous tient, dans notre quotidien. Je parle des soucis, des dettes. Aussi réels que cet instant de rêve. Comment les gens font-ils pour se reposer, pour que leurs jambes au milieu du mouvement ne restent pas en l’air, qu’ils en sortent, qu’ils se reposent vraiment. Tous ces mots à la fin du jour représentent certainement les cadavres de certains bonbons que le corps a juste léchés. Par conséquent, la journée de demain sera aussi douce qu’aujourd’hui, et sera délayée de tous les éléments compliqués ; les admirateurs pourront naturellement s’y baigner.

 

25.07.2022

J’ai beau garder les yeux ouverts, les rêves circulent encore. Je les vois : des rêves, des vieux rêves, d’anciens rêves, des transcriptions, prennent vie. À cet instant de la nuit, multiples, épars – comme l’activité d’un grand port, dirait-on, à la croisée des mondes. Je pourrais les compter. Et ils sont si nombreux. Entre les rêves et les instants de vie, il s’agit d’une immense cité où toute pensée s’affaire , ainsi que des souvenirs, de ma jeunesse, exacts – des moments si parfaitement exacts, que la crainte serait de ne pas vivre la vie qui se présente. Que se passe-t-il à cet instant de la nuit, à cet instant de la pensée pour que tout jaillisse d’un coup, pour que tout d’un coup émerge ? Mille, cent milles, et chaque nouveau rêve que la pensée reconnait. Il faudrait un grand plateau sur lequel s’asseoir et voir tes yeux au centre.

 

11.11.2021

Cette nuit, j’ai rêvé que j’étais chez le dentiste, chez la dentiste, eh bien, je n’avais rien : Impeccable. Dentition totale et parfaite. Pour une fois, mais la première. J’étais allongé sur le fauteuil, la dentiste était derrière moi ; elle me serrait dans ces bras. Tout va bien, me dit-elle. Par ailleurs dans ce rêve, j’avais le poil court : cheveux ras sur les côtés, très denses, racine impeccable. Bref, un vrai sourire de cheval. La suite irait bien.

Avec le songe d’Adèle

Cette nuit, je discutais avec le songe en lui expliquant mes difficultés à publier. La première était que le travail était si délicat qu’une écoute de travers risquait de tout corrompre. Et qu’ensuite, le travail n’avait plus besoin d’être publié, ne représentait pas l’état des matières à venir. Est-ce peut-être pour cela qu’il existe une table des matières dans les livres de bon usage ? Ensuite, je n’arrivais pas à dormir dans le rêve, car quelqu’un avait allumé une ampoule au-dessus de mon lit. Par ailleurs dans le rêve, il n’était pas possible de vivre dans la lumière, comme l’hôte, ses yeux de fillette, ne la supportait pas. J’avais dû avancer deux ou trois autres arguments au songe, sur l’orgueil et la vanité de publier, étant incapable de lui citer mon ami Pierre Drogi sur cette dernière pesée. Et que par conséquent, je n’étais pas en pouvoir de délivrer quoi que ce soit. Un peu comme un arbre auquel on commanderait de commander aux saisons, parce qu’il perd ses feuilles en automne et produit ses fruits en été.

(Vers le 15 juin, par là)

04.11.2018

J’ai fait un affreux rêve. Un rêve affreux. Comme une chute sans fin. Pris au piège de je ne sais quel sortilège. Dans le rêve, je ne faisais plus aucun travail. J’étais condamné à errer. On imagine l’errance comme une marche sans but. Sauf qu’ici dans le rêve, je ne pouvais me rendre nulle part. Le rêve me commandait, ou me condamnait aussi, à vivre dans la partie la plus sombre, la moins ensoleillée du monde. Mon amie Valérie prenait soin de moi, et me réchauffait les jambes et le corps. Je rêvais d’un monde qui n’existait plus, incapable d’agir dans le rêve ni sur ses lois, si bien que tout semblait plus réel que dans la vie éveillée, et que le réveil ne serait ni plus ni moins qu’une plongée plus assidue dans ce cauchemar.

22.08.2018

Certaines zones sont difficiles d’accès. La nuit qui survient est comme une couverture. Chaque bâillement est une épreuve, qui vous enfonce un peu plus dans la nuit ; un peu plus dans le loin ; un peu plus dans l’absence. Chaque bâillement vous fait perdre en force ; il faut le double ensuite pour surmonter le suivant. Le corps est déjà dans les rêves, a déjà basculé. C’est une chute. Durant la nuit, c’est une chute ; comme un courant d’eau qui vient taper les contours de rochers. Le rêve fait jaillir profusion de rêves. En ouvrant les yeux, c’est la mi-nuit : c’est l’obscurité, le grand silence. Le corps se croit régénéré. Le chat alangui sur la couverture ne pipe mot. Son ronronnement invite à replonger la tête dans la taie. Le corps se rendort. Le surlendemain, c’est la même faille : une seconde partie de la nuit aussi riche que la première, avec un débit de rêves qui vous porte à l’épuisement ; avec de drôles d’équations sans résolution possible, qui vous portent jusqu’au petit jour. Les yeux clignent. Le soleil est déjà haut. La maisonnée s’active. Vous sortez du lit, épuisé. Par la fenêtre, en bas, au pied du muret, on peut voir le lavoir ancien, riche de verdure, sec à la lie. 

12.08.2018

Cette nuit, j’ai fait le rêve d’une grande voiture bleue. Une longue et large Cadillac. Le rêve était particulièrement clair, la route particulièrement nette, si bien qu’il n’y avait pas de discontinuité entre l’éveil et le rêve, même si en ouvrant les yeux la Cadillac continuerait sa route. La Cadillac était bleue. Était-ce une Cadillac ? C’était une belle voiture bleue, sans roues. Elle roulait dans les airs, au-dessus de la route. Une belle voiture bleue, couleur ciel ; elle lévitait, parfaitement silencieuse. Et moi, j’étais à l’arrière de la voiture, debout dans les airs, sous le parechoc, les mains accrochées au chrome, dans la confortable position des nageurs, en bord d’eau, se reposant près de l’échelle, sans effort de poids. Et je glissais. Et nous avancions, ma Cadillac et moi. Cela fait longtemps que je n’avais plus fait un rêve aussi net que celui qui se présente, comme si l’œil était extérieur au rêve, un rétroviseur dont la seule fonction est de réfléchir la lumière. Il me souvient du pot d’échappement, dont je respirais quelques particules. Mais ces particules étaient en fait un succédané de la vie éveillée, un article de presse, de la précédente journée. Au réveil, alors que je quittais mon lit, je savais que ma belle Cadillac continuerait de rouler.

distorsion du continuum

J’ai fait un cauchemar, un cauchemar terrible. Je rêvais que je devais prendre l’avion. Mais dans le hall des départs, les guichets n’existaient plus. Je ne reconnaissais plus l’endroit. Il n’y avait que des machines, et un steward affable prêt à vous aiguiller. Les billets qui s’affichent sur l’écran sont hors de prix, et je n’ai plus un rond. Je suis bloqué. Dans le rêve c’est affreux. Peu avant, me rendant à l’aéroport à pied, je rencontre le regard d’une femme ; elle me remet aussitôt un billet de vingt. « C’est très gentil de votre part, mais pourquoi donc ? » C’est l’oeil, me dit-elle, j’ai vu, je n’ai pas réfléchi. Son duvet m’interpelle. Je me réveille. Je conçois alors, en ouvrant les yeux, que la réalité est le rêve. Je regarde mes pieds. Le pouce qui sort de la chaussette est sale et pathétique. Je l’agite. Je conçois alors que la réalité est un filtre et que le filtre agit comme un sortilège. Sortilège, dis-je en sortant du lit, dont je dois me réveiller.

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