Eh oui.
Ici même.
Le pas lent, ou le lent pas
Allumé bien sûr
Mais pas plus que le merle qui chante.
Mais pas le merle de la pensée
Ni le lent pas pas là,
O langage traitre.
C’est ici.
J’entre dans le centre commercial.
Vite vite vite, J’en profite, dit une promotion
Je sors du centre commercial.
Je traverse la rue Bobillot, puis la rue du Père Guérin.
Je remonte les pavés de la rue Gérard.
« C’est l’ici, dit l’ailleurs »
Et moi qui ne sais rien d’une fleur de glycine.
Catégorie : Poèmes (Page 7 of 32)
Journal des poèmes
Être au cœur
Il n’est pas rouge, mais vert
Vers ici au cœur.
Dans l’allée, des nuées de moucherons indisposent le passant
Cela fait deux décennies que j’écris et : Il y a de la vie partout partout Partout
Le geai des chênes furtif se pose près du banc
Je le suis du regard de feuille en feuille, parmi les mésanges festonnant dans la nuée des branches
À écouter de loin de près, à décentrer l’attention, l’homme est une petite part.
Une grive musicienne s’est mise à chanter; ou je l’écoute ou j’écoute
Nous sommes une petite part de la grande part.
Expérimenter la langue pour
mieux voir, mieux entendre.
Expérimenter, exprimer.
Quémander aux dieux comme le sansonnet la miette
et l’humain un chant neuf, recommencé.
Quitter, quitter, mais quitter quoi ?
Quitter pour mieux deviner la forme du reflet.
Sur l’avenue des Gobelins, la voiture du cirque Zavatta passe au ralenti, et nous informe du spectacle qui vient, avant le défilé du 1er mai, après les feux d’artifices des financiers.
Les moucherons ont leur nuée.
Ici, tout est tracé.
Apprendre à voir comme le chien sent,
Peut-être est-ce le chemin de la rédemption,
la mie, la mie tendre, mais lui à cet instant veut la croute,
la racine qui ouvre le ciel.
Il n’y a plus d’histoires à raconter. Le merveilleux est mort. En était-il autrefois de telles assertions possibles ? Dans la petite allée les passants s’en vont, certainement au travail. Et les quelques retardataires, à moins qu’ils s’agissent de retraités, mais certainement des humains, sont à leurs fenêtres. Je suis la seule personne dans le jardin assise sur le banc. Il pleut. Il ne pleut pas des cordes, mais des gouttes tombent et font leur bruit sur la capuche. Le cerisier s’est vêtu de ses pompons de fleurs. Outre cette magnificence la nature pourtant silencieuse semble être présente au jour. Que dis-je, elle semble consciente. Il n’est plus d’histoire à raconter, dans le cœur des hommes. Peut-être le merveilleux s’est-il déplacé en son origine. Un groupe d’écoliers traverse le chemin. Il s’agit certainement d’une classe. On voit la flamme encore virevolter au-dessus de ces jeunes statures en mouvement. Je ne sais pas bien ce que le merle pense de nos présences, mais il regarde les passants, lui aussi, tout en avançant, en sautillant. Il pleut plus encore. La narration est elle possible encore dans le cœur des hommes ? Qui s’est arrêté devant le cerisier en fleurs ? Le merle rend grâce.
Voir revoir
Voir à nouveau le présent,
Voici mon espérance ;
Le présent Immédiat
Le présent d’avant le présent
Le présent joueur ;
Jou-eur, dites-le à votre guise,
Mais si vous l’écrivez
Séparez bien les lettres, mettez-y du vide
Ne vous laissez pas dompter par la chaise.
A vous asseoir, riez
Chaque fois que le mouvement de vous asseoir s’opère, riez.
Riez. Riez riez riez !
Mais il est déjà tard :
Je suis assis dans la chaise et la chaise vit en moi.
Le présent s’éloigne.
Le soleil entre jusqu’au rêve
Corps conscience, écuelle,
Tous les chiffons de la veille baignent encore,
tandis que le corps a repris le chemin du jour.
Trains en retard, lignes se défaussent ; qu’y pouvons-nous ?
Le soleil dans la vitre rêve-t-il parfois,
Se prend-il pour une étoile, lointaine,
tandis que partout les hommes ont réveillé le jour
Ont secoué ses puces.
C’est le même, vingt ans après dans le miroir
Le même : la même posture Ce jeune homme refait surface Avec Ses mêmes
questions ses mêmes ouvertures
Quoi le ressuscite ?
Peut-être une posture
Le manteau n’est plus le même mais la présence des manches de ce manteau ancien est plus réelle sur sa peau que celui qu’il porte, que le corps du train, ou celui de la plaine.
Le reflet de la vitre ne renvoie rien de son visage ; il est le paysage du matin, hivernal, avec ses arbres nus, ces murs en meulière, ces fils qui longe la vie.
Le reflet de la vitre du train ne renvoie rien de son visage si ce n’est un fin croissant : de lune, de paysage.
Ce jeune homme est le même.
Rien n’a changé
Que reste,
Quel reste ?
Le jour pointe.
: Une interrogation ?
Mais une interrogation douce sans question
aucune.
Une exclamation, mais une exclamation
en deçà de la langue.
Deux points : ouverts comme un oeil — neuf
de trois jours sans langage
Une virgule, parce qu’il en faut des virgules
Vent, épis, et vient le point (,)
parce que tout recommence.
Il resterait : deux points, une virgule dans les mains
Cette exclamation sous la langue
Et cette interrogation sans question.
Le jour pointe.
Sans se rendre
Sans rendre
Sans se rendre compte
Sans rendre des comptes
La matière jour pose ses feuilles sur le socle du temps
Et les yeux d’aujourd’hui ne sont plus tout à fait
les yeux de demain.
Plusieurs vies se succèdent, l’homme d’hier
n’est plus l’homme du jour.
Pourtant, l’enfant demeure.
Combien de barreaux tiennent-ils à l’échelle,
Combien de vivants souvenirs ?
Un pas de plus, un pas encore.
Venu pour le spectacle.
Les incidents de parcours sont nombreux.
Les volets ne s’ouvrent pas.
Pourtant en chaque instant il est cette possibilité
d’un autre lieu d’un autre paysage,
C’est toujours un événement.
Mais ici le spectacle est déjà rangé : la lumière inonde la scène.
Ici, il fait nuit.
Pourtant en chaque instant la vie est une promesse d’aube.
La vie serait en colimaçon,
Chaque fenêtre resterait close, la suivante attend —
Attention à la marche.
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