Raphaël Dormoy

Littérature, écriture

Page 20 of 51

05.09.2021

Le temps s’allonge comme les rails dans la gare
Par les rails à cause les rails
Comme le temps ne vient pas.
Ronds vides, au sol, comme des horloges
sans heure qui signifient : Juste attendre.
Attendre quoi ? Attendre le temps.
Le lézard cette aiguille filante, lui
a tout compris.

04.09.2021

Les trois cygnes au milieu de la Seine
Les pommes au milieu du jardin
Les nuages passant au milieu du ciel
Les notes de musique sur la caténaire
L’espace sauvage au milieu du RER
La rouille sur les structures
Les oiseaux sur la rambarde
C’est ce que mes yeux retiennent 
malgré eux, malgré moi,
Dans le paysage,
Dans le paysage,  lignes parmi les rails.

31.08.2021

Celui qui n’a pas vu la nuit n’a pas vu le jour

Se lever, sortir les limbes de l’oubli
Renaitre au fond des yeux, du cœur.

Alors le corps respire, lentement amplement
Comme on souffle sur les tisons d’une Mémoire.

Le corps respire et prend l’air, tout l’air du ciel
pour garder trace,

Comme celles que les murs font
sur les flancs de colline,

Le corps respire pour garder trace, au plus profond de lui,
lorsque le la non nuit aura recouvert le jour.

29.08.2021

Je suis dans le train du retour
À l’aller j’ai écrit un poème
Ce n’est pas vraiment le train du retour
C’est le train :
C’est le train Corail avec ses rideaux poussiéreux
Ses sièges épais moelleux
Qui peuvent faire une banquette quand on soulève l’accoudoir ;
Avec les plafonniers qui courent sur les côtés,
Et les rideaux qui bougent un peu.
Le train Corail et ses vitres sales
Et son bruit ouaté mais continu ;
Et ses suspensions plus molles qu’une selle d’un cheval, au trot bien entendu.
Je suis dans le train.
Et une fois encore, il ne tient qu’à moi de choisir la destination.
Comme tous les jours.

 

25.08.2021

Mais si tout est silencieux
Pourquoi cette angoisse ?
Les paroles que mes voisines dans le RER déroulent flottent comme les algues à la surface du réel.
Discussion de travail, technique, laquelle constitue leur propre réel.
La Seine paraît plus bleue qu’à l’accoutumée, plus verte, presque turquoise, comme dans ce rêve fait il y a 8 ans, avec le fleuve qui coule au milieu d’Abidjan.
Autour de moi, dans le RER, ces mêmes têtes inconnues,
tandis que nous traversons la forêt sauvage.
Alors, pourquoi cette inconnue ?
Je me rends soudain compte être aussi transparent que mon environnement, que mon corps constitue une eau d’un aquarium ouvert.
Je me rends au travail.
Je vais au bureau.
Quel type de poisson vais-je accueillir ?

 

21.08.2021

Une goutte est tombée sur ma lèvre
Ciel chaud
Le corps transpire
Une goutte qui allège l’esprit
emberlificoté dans les pièges de sa propre mémoire.
Une goutte qui tombe là,
Dans la fiction des jours
À l’intersection de la rue Froidevaux et de l’avenue du Maine
Tandis que le soleil se couche.
Une goutte au passage des trains,
des voitures,
Une goutte qui rend le monde tel quel, à sa nature première,
tel un livre ouvert.
Une goutte qui
tantôt contiendrait l’univers entier.
Puisse cette goutte tomber sur ma lèvre encore.

23.08.2021

 

Ce que je ressens 
D’autres aussi le diront 
Sous la même lune

Ce que je ressens ?
D’autres le diront aussi 
Sous la même lune 

 

 

 

(poème retrouvé) 

17.08.2021

Faire du beau parmi les mailles du réel
Jouer cette note-ci plutôt qu’une autre
La vie est un enchevêtrement de cordes,
invisibles, ne l’oublie pas, qui vibrent.
C’est comme cette concentration à laquelle tu t’emploies
chaque jour dans le chemin physique des jours,
concentration à voir, qui est un relâchement de l’esprit ?
Sauf que là tout se joue dans l’espace aérien, subtil.
Le téléphone va sonner, prépare-toi.
Cette autre personne qui te pousse dans le vide, vois cette corde,
musicale. Apprends à jouer.
Et si la chose te semble difficile, techniquement impossible,
elle n’est peut-être pas plus compliquée qu’un sourire lâché
en direction d’un sourire.

 

15.08.2021

Je marche
Je marche au même endroit 
Mais je respire,
      plus amplement
Et je maintiens cette amplitude dans la marche

J’ouvre,
J’ouvre les yeux
J’ouvre les yeux dans les yeux
Et je souris intérieurement(,)
       Sourire en coin

Et je respire un peu de moi
    que j’expire  Oh, oh oh
Oh monde vierge  

Je sors alors ma machine 
O vieux boîtier,
J’arme le déclencheur
Je débraye la virgule
 
Et je vous en prie puisque vous êtes là

          Souriez. 

Sans titre

il y avait toujours la croyance l’espoir que quelque chose surviendrait. Les plus téméraires s’agitaient encore. Les autres reproduisaient le même sourire, le même souvenir. C’était toujours une gesticulation spontanée, qui provoquait une étincelle, puis le corps retombait derrière le verre. Les autres avaient le même succès, avec leur sourire, mais force est de constater qu’ils étaient eux aussi à la merci de cet espace étriqué, à travers lequel nulle lumière ne passait. Beaucoup d’entre eux renonçaient, et décidaient de se reproduire ici, de fonder un petit foyer, avant que la mort ne les fasse disparaître. Les autres restaient là, en attendant. En attendant quoi ? Il y avait toujours une espérance secrète. Faire un feu avec ces morceaux de bois. Utiliser ces deux morceaux de bois pour faire de la musique. Gravir les échelons. Mais on allait jamais très haut, et c’était souvent juste pour la photo. Le verre avait une sacrée épaisseur, et par conséquent il rendait le moindre monde peu lisible. Et pourquoi aller si loin. C’était là le grand paradoxe des uns. Et le renoncement des autres. Grand paradoxe pour les uns puisque leur espérance dépassait la circonscription, en même temps ne rêvaient-ils pas de se circonscrire ? La jeunesse est une croissance tout en longueur, mais ensuite il vous faut composer avec le poids des années, le poids de toutes ces branches. Alors allez plus haut allez plus loin n’est pas si aisé, n’est pas si spontané. Déplacer plus de matière vous coûte en énergie. Le monde n’est plus si vaste que ça. Comment les gens font-ils ?Comment les gens font-ils, d’un point de vue mécanique. D’un point de vue strictement physique. Les convictions sont peut-être le bois dur de leur prise de poids et d’espace, en deçà desquelles le sujet pourrait être parfaitement mou de l’intérieur. C’est pourquoi, qui renoncerait à ses convictions ? À sa place chèrement acquise ? Alors vous comprendrez la fixité des positions, même pour le chancre le plus infâme : agile mais parfaitement souple si bien qu’aucune semelle ne puisse l’écraser ; ou bien rustre et parfaitement immobile si bien qu’aucune masse ne pourrait l’altérer. Pourquoi aller voir plus loin ? Plus haut certes, mais plus loin ? Il faut croire que certains sont plus dépourvus de mobilités que d’autres, je veux dire techniquement parlant. Qui viendrait prendre soin d’eux ? Et par conséquent ceux-là qui ne peuvent s’inventer des ailes, ceux-là qui ne peuvent s’inventer un horizon vertical, ceux-là qui ne peuvent défier les lois de la physique et de l’aventure, sont obligés de s’inventer de nouvelles formes, s’ils veulent voir du pays… Santé

28.07.2021

« Older posts Newer posts »

© 2025 Raphaël Dormoy

Theme by Anders NorenUp ↑