Raphaël Dormoy

Littérature, écriture

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02.02.2022

Page après page
Jour après jour,
Qu’a-t-on gagné ?
L’interrogation.
C’est toujours le même paysage, comme une fréquence particulière ;
Et le gros bouton, à moduler.
Parfois une fréquence vous happe
Et c’est le grand rire.
Mais il y a le paysage
Mais il y la lumière
Mais il y a la matière dont la lumière se vêt.
Lumière, matière, obscurité.
Amen.

 

20.01.2022

C’est peut-être ça vivre : tenter de préserver une parcelle. Une parcelle de bleu, ou de blanc. Une parcelle de nuages ou de matière. Une parcelle. Mais une parcelle. Enfant, on imagine cette étendue presque infinie, et le seul fait de la voir, ou de l’aimer, suffit. Mais un jour, on se rend compte qu’il est trop tard. À n’y faire attention pas du tout, cette parcelle autrefois sans autre horizon que la ligne du désir, est un morceau de miettes dans vos mains. Et alors, on se rend compte que maintenir ne serait-ce qu’un ilôt de cette parcelle dans le vacarme du monde peut être le but ultime, le principe supérieur, qui conduirait toute l’action d’un quotidien voué à disparaître. Qu’on pourrait se retrouver très vite sans rien. Démuni, dénudé, sans le principe vital qui fait ressort, que les boulangers appellent leur levure. Ah, le monde frappe à notre porte à chaque instant. Et tant sont nombreuses ses perspectives de nous suffire, de nous pénétrer. Derrière ces prospectus, ces images, ces enveloppes, il suffit de les ouvrir, de les déchirer pour entendre le supplice des uns, le hurlement des autres, aime-moi, aide-moi, voire l’irrépudiable désir de prendre votre peau, d’étouffer votre rien comme le soleil qui darde ses rayons sur votre visage. Quelle parcelle de monde vaut le dénuement et le silence ? Quel fou espère quand plus rien n’est. Mais c’est cela, maintenir cette parcelle, cette parcelle de vie faite du haut silence.

14.01.2022

Rien rien
Ôter la pierre mais pas la pierre
Toute trace, la décoller et tenter de s’en débarrasser les doigts même si ça colle
il y en a partout sur les yeux la bouche
Rien rien
Mais ils sont comme l’oiseau
De pierre en pierre de décharge en décharge ils reviennent
Écouter le bruit quand on rapproche l’oreille du paysage : être ce trou d’air dans le paysage  
Mais après, qu’a-t-on découvert ?
Le soleil.

11.11.2021

Cette nuit, j’ai rêvé que j’étais chez le dentiste, chez la dentiste, eh bien, je n’avais rien : Impeccable. Dentition totale et parfaite. Pour une fois, mais la première. J’étais allongé sur le fauteuil, la dentiste était derrière moi ; elle me serrait dans ces bras. Tout va bien, me dit-elle. Par ailleurs dans ce rêve, j’avais le poil court : cheveux ras sur les côtés, très denses, racine impeccable. Bref, un vrai sourire de cheval. La suite irait bien.

28.10.2021

Fantasme – Changer de dimension, moi qui voulais changer le monde. Changer de dimensions. Être plus terre à terre, et considérer les anciennes lubies comme des ballons rouges, dans une ville. Dans une vie où tout est facile. J’ai déplié mes bagages. Les pulls et les affaires. Tout est si simple ici. Je ne cours plus après l’argent, après le temps. Tout est si simple. Certes c’est exigeant, mais les broutilles d’autrefois sont des miettes de pain, sur la table, qu’on dégage d’un coup de manche. Je ne pensais pas que la vie pouvait être si simple, coulait de soi. Même pour les indigents. Et dire que je les jugeais autrefois. Ils sont heureux. J’avais juste pris la vie du mauvais départ. Un bout de manche, un bras de chemise pris dans un rouage. Et moi qui continuais de m’acharner dans cette liberté bloquée. J’en r’irais presque. Les idéologues avec leurs idées, voilà l’indigence ! Non mais, dans quel monde vit-on.

28.10.2021

Dans quelque temps, je m’allongerai dans ce corps et je ne me réveillerai pas. Voici la destination. Il n’y a plus de sujet à se faire, ni d’angoisse ni de mouron. Alors chaque jour, chaque heure : pourquoi nous presser. J’arriverai tôt ou tard et nous n’aurons même pas le loisir de trinquer à cette victoire. Trinquons avant, chaque jour, de tout notre saoul. Et si tant est que le plateau qui porte la coupe soit trop lourd, rendons-nous tout légers, sans nous rendre coupables du poids. Prenons la vie comme elle est, comme elle vient, comme un ciel. Ni l’arbre ni le ciel ne diront rien de l’envol. 

27.10.2021

Dans le ciel, quoi trouverais-je ? 
Des mots ? Ce sont les murs, mais je vois le ciel.
Combien traverserai-je le pont ?, encore une fois.
J’écris le poème dans le tunnel.
D’autres s’adressent à leurs amis, comme pour maintenir le pont entre les deux falaises,
Mais moi, à qui écris-je ?
Quelle espérance est-il à tracer ces mots ?
Quelle espérance, alors que tout va vers le silence.
Les mots sont presque plus fragiles que d’habitude ;
Ils se casseraient à les prononcer facilement.
Est-il une lettre encore que je puisse mettre dans ce poème.  

22.10.2021

Comment savoir si j’y suis ?
Y suis-je vraiment  ?
Ne me suis-je pas raconté des histoires ? une espérance  ? 
Y suis-je vraiment ?  Ça me paraît, net comme la lentille à l’exacte distance de la feuille et du silence 
Mais alors ? Mais alors, il n’est plus rien à faire
Et l’espérance est un arbre d’abondance.
Il faut tailler les branches, certes.  

 

19.10.2021

À quoi à quoi bon ?
Tout est là, derrière les mots.

Derrière les mots.
Faire varier le brûleur qui éclaire, certes
Mais tout est là.
Alors à quoi bon,
Tout est là.
Ça fait quand même un qui se pose
Ça n’éclaire pas le ciel.
Un qui se pose pour dire quoi :
Tout est là
Tout est là ? Tout est là.
C’est le cil brossé sur la note musicale : tout est là.

Comme une oreille derrière la paupière.

Mais il faudrait voir les yeux rouler sur l’asphalte,
les voir bondir et sauter, les yeux de verre.

Mais non.
Tout est là.

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